"Ruines et paysages, Salon de 1767", Denis Diderot.
Je crois que j'ai rarement connu une période aussi creuse niveau lectures. Depuis La Flèche noire, je n'ai pas terminé un seul ouvrage O_O Je ne sais pas si c'est la crise de flemme ou le fait que j'ai passé mon temps sur Miroir, mais ça devient très grave.
A ma décharge, je suis toujours plongée dans le très long et très dense Ruines et paysages, salon de 1767 ( des "chroniques d'art" de Diderot, qui critique les tableaux exposés au Salon officiel de l'Académie royale de peinture, et qui est au programme de cette année ).
Je viens de terminer la petite quinzaine de pages du milieu où il liquide les oeuvres des artistes les plus médiocres. Ses tirades passionnées sur les peintres dont il apprécie l'oeuvre sont magnifiques, mais alors ses tous petits articles incisifs et méchants sur ceux qu'il n'aime pas sont de véritables morceaux d'anthologie !!
Un exemple :
MADAME VIEN ( *la femme du peintre Joseph-Marie Vien, dont il parle plus haut dans le livre )
Une poule huppée, veillant sur ses petits. Très beau petit tableau ; bel oiseau, très bel oiseau ; belle huppe, belle cravate, bien hérissée, bec entrouvert et menaçant, oeil ardent, ouvert et saillant, caractère inquiet, querelleux et fier ; j'entends son cri. [...] Il y a des détails de nature à faire illusion. L'artiste n'a pourtant pas remarqué qu'alors une poule d'une grosseur commune, prend un volume énorme, par l'étendue qu'elle donne à toutes ses plumes ébouriffées. Madame Vien met dans ses animaux de la vie et du mouvement. Je fus surpris de sa poule ; je ne croyais pas qu'elle en sût jusque là.
Coq faisan, doré de la Chine.
Il s'en manque bien que le coq soit de la force de la poule. Assez chaud de couleur, il est froid d'expression, sans vie ; c'est presque un oiseau de bois tant il est roide, lisse et monotone. J'aime mieux que l'oiseau, ce petit massif de fleurs, de verdure et d'arbustes, placé sur le fond ; quoique ce ne soit pas merveille.
Réparation à madame Vien. J'ai dit que son coq était sans mouvement et sans vie ; et je viens d'apprendre qu'elle l'a peint d'après un coq empaillé.
Je vous jure qu'après les envolées lyriques de trois pages où il s'extasie sur un coin de paysage de Vernet avant de partir en délire sur les pouvoirs des ténèbres et de la lumière en peinture, ce genre de description froide et poliment méchante ressort comme un bon gag au milieu d'un film particulièrement drama. Et Diderot étant spécialiste de ce genre d'ironie, on se régale franchement, malgré le côté ardu de ce genre de lecture.
Je ne suis pas particulièrement fan de la littérature des Lumières, mais j'avoue que depuis Jacques le Fataliste, Diderot est un de mes grands chouchous. ( Lisez Jacques le fataliste et son maître, les gens, même si vous n'aimez pas les classiques : ce bouquin est un chef d'oeuvre d'humour et de satire bien piquante. Même sans les cours qui vont avec, je vous promets un grand moment de marrade. ) Et j'espère que même la perspective d'avoir à plancher dessus en fin d'année (*) ne m'en dégoûtera pas de sitôt...
Il m'en reste encore plus de la moitié à lire... Mais comme c'est long et fastidieux, je vais tout de même essayer de continuer à lire autre chose à côté ( Montheillet, j'arrive !! ).
(*) J'ai appris aujourd'hui que j'allais être obligée de passer ce putain de bordel de concours d'entrée à Normale Sup' pour espérer avoir mes équivalences de L2 O__O C'est du chantage !!! Je veux pas aller à l'ENS, moi ç___ç
A ma décharge, je suis toujours plongée dans le très long et très dense Ruines et paysages, salon de 1767 ( des "chroniques d'art" de Diderot, qui critique les tableaux exposés au Salon officiel de l'Académie royale de peinture, et qui est au programme de cette année ).
Je viens de terminer la petite quinzaine de pages du milieu où il liquide les oeuvres des artistes les plus médiocres. Ses tirades passionnées sur les peintres dont il apprécie l'oeuvre sont magnifiques, mais alors ses tous petits articles incisifs et méchants sur ceux qu'il n'aime pas sont de véritables morceaux d'anthologie !!
Un exemple :
MADAME VIEN ( *la femme du peintre Joseph-Marie Vien, dont il parle plus haut dans le livre )
Une poule huppée, veillant sur ses petits. Très beau petit tableau ; bel oiseau, très bel oiseau ; belle huppe, belle cravate, bien hérissée, bec entrouvert et menaçant, oeil ardent, ouvert et saillant, caractère inquiet, querelleux et fier ; j'entends son cri. [...] Il y a des détails de nature à faire illusion. L'artiste n'a pourtant pas remarqué qu'alors une poule d'une grosseur commune, prend un volume énorme, par l'étendue qu'elle donne à toutes ses plumes ébouriffées. Madame Vien met dans ses animaux de la vie et du mouvement. Je fus surpris de sa poule ; je ne croyais pas qu'elle en sût jusque là.
Coq faisan, doré de la Chine.
Il s'en manque bien que le coq soit de la force de la poule. Assez chaud de couleur, il est froid d'expression, sans vie ; c'est presque un oiseau de bois tant il est roide, lisse et monotone. J'aime mieux que l'oiseau, ce petit massif de fleurs, de verdure et d'arbustes, placé sur le fond ; quoique ce ne soit pas merveille.
Réparation à madame Vien. J'ai dit que son coq était sans mouvement et sans vie ; et je viens d'apprendre qu'elle l'a peint d'après un coq empaillé.
Je vous jure qu'après les envolées lyriques de trois pages où il s'extasie sur un coin de paysage de Vernet avant de partir en délire sur les pouvoirs des ténèbres et de la lumière en peinture, ce genre de description froide et poliment méchante ressort comme un bon gag au milieu d'un film particulièrement drama. Et Diderot étant spécialiste de ce genre d'ironie, on se régale franchement, malgré le côté ardu de ce genre de lecture.
Je ne suis pas particulièrement fan de la littérature des Lumières, mais j'avoue que depuis Jacques le Fataliste, Diderot est un de mes grands chouchous. ( Lisez Jacques le fataliste et son maître, les gens, même si vous n'aimez pas les classiques : ce bouquin est un chef d'oeuvre d'humour et de satire bien piquante. Même sans les cours qui vont avec, je vous promets un grand moment de marrade. ) Et j'espère que même la perspective d'avoir à plancher dessus en fin d'année (*) ne m'en dégoûtera pas de sitôt...
Il m'en reste encore plus de la moitié à lire... Mais comme c'est long et fastidieux, je vais tout de même essayer de continuer à lire autre chose à côté ( Montheillet, j'arrive !! ).
(*) J'ai appris aujourd'hui que j'allais être obligée de passer ce putain de bordel de concours d'entrée à Normale Sup' pour espérer avoir mes équivalences de L2 O__O C'est du chantage !!! Je veux pas aller à l'ENS, moi ç___ç